Communiqué de l’Observatoire du Nucléaire, Mercredi 19 avril 2017
En modifiant le 23 mars 2017 le décret de création du réacteur nucléaire EPR en construction à Flamanville (Manche), le premier ministre Bernard Cazeneuve a rouvert la possibilité de contester ce décret qui avait été signé par M de Villepin le 10 avril 2007, à la sauvette, juste avant l’élection présidentielle de 2007.
Avec 7 autres associations, l’Observatoire du nucléaire a donc déposé ce 18 avril, auprès du premier ministre, un « recours gracieux », étape obligée avant un recours effectif devant le Conseil d’Etat.
Le décret de création de l’EPR, qui plus est sous sa forme modifiée (le délai pour construire le réacteur et le charger en combustible a été porté de 10 à 13 ans), est en effet marqué par de nombreuses tromperies à l’encontre des citoyens et des parlementaires, qui ont participé à l’époque à des débats tronqués : débat de la Commission nationale du débat public (CNDP) pour les citoyens et associations, débat parlementaire pour les députés et sénateurs.
En effet, les révélations de ces derniers mois montrent que les graves dysfonctionnements de l’usine Areva du Creusot, où ont été forgées de nombreuses pièces de l’EPR et en particulier sa cuve, étaient connus dès 2005 par EDF, Areva et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Or ces informations ont été maintenues secrètes, cachées aux citoyens et aux parlementaires qui ont de fait été abusés.
Ce véritable scandale d’Etat ne semble pas avoir ému le pouvoir socialiste finissant puisque, loin de taper du poing sur la table, MM Hollande et Cazeneuve, et Mme Royal, ont accordé à EDF une prolongation de 3 ans du délai prévu au départ.
En 2007, en fixant à 10 ans ce délai pour un réacteur supposé être achevé en 4 ans et demi, M De Villepin pensait avoir vu large, mais c’était sans compter l’incompétence de l’industrie nucléaire française, qui est déjà la risée du monde industriel mondial pour le désastre de l’EPR qu’Areva ne parvient pas à construire en Finlande : il devait entrer en service en 2009 mais n’est toujours pas achevé à ce jour.
Par ailleurs, l’Observatoire du nucléaire rappelle que c’est lui et non l’ASN qui a saisi la justice en mai 2016 concernant les malfaçons et falsifications qui ont eu lieu dans les usines d’Areva. Ce n’est que 6 mois plus tard, de toute évidence pour essayer de s’extirper du banc des accusés, que l’ASN a elle aussi saisi le procureur. Mais l’Observatoire du nucléaire rappelle que, dans cette affaire gravissime, l’ASN fait partie des coupables : tout comme Areva et EDF, elle a caché pendant des années les graves fautes commises dans les usines d’Areva.
Pire : l’ASN a commis une faute majeure en décembre 2013 en autorisant EDF à installer la cuve de l’EPR dans le réacteur en chantier, malgré les informations qu’elle détenait déjà concernant les malfaçons de cette cuve. Aujourd’hui, la cuve ne peut être extraite qu’en détruisant une partie du réacteur, option inacceptable pour EDF qui impose de fait une pression maximale sur l’ASN pour la contraindre à valider l’utilisation de cette cuve pourtant défectueuse.
Gravement impliquée dans ce scandale d’Etat, et portant comme une croix l’autorisation qu’elle a donné en décembre 2013, l’ASN s’est elle-même réduite au rang de complice d’EDF et d’Areva et n’est donc plus en mesure d’imposer la seule décision raisonnable, à savoir l’invalidation de la cuve de l’EPR. Les citoyens doivent donc s’organiser pour protéger leurs vies et, de fait, pour faire que cette cuve ne soit jamais mise en service.