En direct de l’Union des luttes environnementales du Tarn,
un compte rendu très intéressant, réalisé par Christine Bourdalé, de la réunion publique tenue en présence de Geneviève Azam le 31 mars 22 : les GPII grands projets inutiles et imposés
Les GPII , destructeurs et polluants, font partie d’une logique systémique : ils sont liés les uns aux autres.
Au départ il y avait une stratégie coloniale : les ressources étaient recherchées ailleurs qu’en Europe, mais c’est maintenant aussi chez nous et partout dans le monde.
Cela conduit au développement d’infrastructures industrielles, et à l’industrialisation de la terre, des communs, des services et à une rationalisation de tous les domaines mis au service de ces infrastructures, comme les flux, les transports, la main-d’œuvre…
Cette croissance doit être auto-entretenue .
Lors des 30 glorieuses, ce modèle de développement extractiviste, d’accumulation, ne concernait que 10 % de la population mondiale et avait donc moins d’impacts.
Depuis 1980 il y a eu globalisation économique et financière, avec libre-échange généralisé. L’accélération s’est poursuivie après la crise de 2008, à cause de la prise de conscience des limites écologiques (rareté des ressources,..), et sociales, ce qui a conduit à une fuite en avant pour une course à l’accaparement.
Ce qui était conçu comme un progrès lors des 30 glorieuses ( aménagement des terres, plus de croissance) ne l’est plus, il y a un changement d’« imaginaire » ; maintenant nous sommes dans l’imaginaire de la dématérialisation par le numérique, mais en réalité les services (considérés comme de l’immatériel), sont bien basés sur des serveurs numériques, des flux de transport, des cultures, des extractions…
L’extractivisme a déjà par le passé créé des fins de monde, pour des peuples entiers et leur culture, comme en Amérique du Sud. L’extractivisme concerne aujourd’hui plus que les ressources minières, ce sont aussi les déforestations par exemple, et même l’accaparement de nos données personnelles par des sociétés, ce qui a pour conséquences la multiplication des serveurs numériques, qui nécessitent eux-même des ressources matérielles (eau, énergie, métaux rares…)
Ce modèle de développement implique aussi une organisation rationnelle et logistique, et même militaire de la gestion des ressources : conteneurs, autoroutes, pipelines, aéroports, gares, ports… sont créés pour permettre la circulation des marchandises et des ressources. La valeur vient de la circulation, quelque soit le contenu.
C’est aussi un modèle de développement basé sur l’instantanéité, il faut que les biens soient livrés rapidement , nous sommes dans les flux. La captation de ces flux est organisée : il faut que les entreprises soient sur les bons endroits sur les routes de circulation.
Il y a une colonisation des territoires , bien marquée par le phénomène de métropolisation : destruction de la ville, qui devient sans forme, sans limite ; l’espace est utilisé pour l’aménagement ; or la biodiversité, comme l’humain, a besoin d’espaces sauvages. Les métropoles entraînent aussi une ségrégation sociale : les métropoles veulent attirer les classes actives, elles doivent être attractives en créant des parcs culturels, des centres commerciaux , des écoquartiers. Il ne faut pas être enclavé (alors qu’être enclavé va devenir un atout).
Le sol devient un simple support des activités industrielles, on tente de le manager, il devient du capital ; nous tentons de dominer la terre , de la mettre à notre service. Mais la terre a une autonomie.
Il y a une promotion du capitalisme vert, de la croissance verte et inclusive , de la transition énergétique ; on crée des grands parcs éoliens, l’agriculture 4.0, les fermes-usines, l’agriculture assistée par ordinateur, les smart-cities : les nouvelles énergies ne font que s’additionner aux anciennes car les besoins sont immenses.
Le système est fragile et vulnérable, aujourd’hui il ne peut plus avancer sans détruire, et créer famines, sécheresses…
Cela crée de la violence, de l’agressivité, des rapports de force, car il n’y a pas de solutions faciles et acceptables ; nous sommes dans des conflits de vision du monde.
La gauche progressiste a cru en la puissance de l’humain dominateur de la nature, (virilité, machisme ) mais la nature ne se négocie pas ; la Terre ne peut pas être humanisée entièrement. Avec le climat il n’y a rien à négocier ; les lois naturelles ne sont pas des lois humaines, sociales, elles ne nous appartiennent pas. Nous avons activé des forces sur- humaines. Les sociétés humaines ne sont pas à naturaliser, mais elles sont dépendantes des milieux de vie. Il n’y a pas d’émancipation des lois de la nature, au bout du progrès ! On revient aux produits essentiels. Le modèle est fragile par nature.
Nous défendons nos milieux de vie, ce à quoi on est attaché , et on défend notre humanité, notre culture humaine ; on retrouve aujourd’hui ces attachements à un territoire, ce sont des repères de l’Histoire, de la mémoire. C’est ce qu’on est en train de retrouver dans ces luttes concrètes, enracinées.
Il peut être écouté sur l’émission La Bande Jaune :
http://rdautan.free.fr//Emissions/Des_Gilets_Jaunes_Vous_Parlent/22.04.08%20LBJ%20-%20EMISSION%2050%20-%20.mp3
Le pilier juridique de la lutte est très important, et il y a aussi les actions, la mise en place d’ alternatives sur les lieux que l’on défend. Les luttes s’installent sur les territoires et s’y enracinent en y vivant et en les occupant (cf Larzac, Notre Dame des Landes, Bure…)
De nouvelles alliances se tissent : avec des élus, des juristes des paysans, des naturalistes, mais aussi des alliances inter-espèces, comme avec l’élanion blanc sur la lutte contre Terra 2, Triton marbré (NDL), libellule (Sivens). L’eau aussi est une alliée, elle est vivante, ce n’est pas une ressource mais une source.
pour en savoir plus, les liens https://lessoulevementsdelaterre.org
https://terresdeluttes.fr/ et le collectif lesterrestres.org